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Reconstruction après un pervers narcissique : comment je me suis relevée seule ?

Après cinq ans sous emprise, je suis partie. Mais je ne suis pas allée en thérapie. Je ne me suis pas vengée. J’ai juste décidé de ne pas crever. Ce texte, c’est le récit brut d’une reconstruction sans psy ni gourou. Une survie bancale, libre, réelle. Pour que celles qui galèrent sachent : c’est possible, même seule.

Pas de psy, pas de miracle, juste moi

Je ne me suis pas couchée sur un divan. Je n’ai pas eu de révélation mystique. Je n’ai pas pleuré dans les bras d’un thérapeute diplômé d’Instagram.
Je n’ai pas guéri proprement.
Je me suis relevée seule. Pas parce que je suis plus forte que les autres. Mais parce que je n’avais pas le choix.

Quand j’ai quitté le pervers narcissique qui m’avait rongée pendant cinq ans, je ne suis pas tombée dans un cabinet de psy. Je suis tombée dans le vide. Et c’est depuis ce vide que j’ai dû tout réapprendre. Respirer. Manger. Dormir. Penser. Ne plus me haïr.

Je n’avais ni argent, ni force, ni confiance pour “faire une thérapie”. Et surtout, je ne voulais plus confier mon histoire à un inconnu. J’avais été trop souvent trahie. Violée. Manipulée. Alors j’ai décidé que j’allais me sauver toute seule. Même mal. Même lentement. Même en boitant.

Cinq ans d’emprise : comment j’ai guéri d’une relation toxique

Mais ici, je raconte l’après. Pas celui qu’on voit dans les films. Le vrai. L’envers de la liberté. Les cris intérieurs, les cauchemars, les jours où rien ne tient debout. Et surtout, les petites victoires. Celles qu’on ne poste pas sur les réseaux mais qui nous sauvent quand même.

Après la rupture : chaos, sidération, solitude totale

Quand je suis partie, je croyais que j’allais respirer. J’imaginais l’air frais, le silence apaisant, la paix retrouvée.
Mais ce que j’ai trouvé, c’est le vide. Un silence épais, lourd, presque agressif. Pas un silence de repos. Un silence de champ de bataille après l’explosion.

Il n’y avait plus personne. Juste moi, avec les ruines.

Je n’avais plus de contact avec ma famille, presque plus d’amis. Il m’avait méthodiquement isolée. Éloignée de tous ceux qui m’aimaient. Et même si certains sont revenus plus tard, à ce moment-là, j’étais seule. Débranchée de tout. Sidérée. Incapable de bouger.

Je ne mangeais plus. Je ne dormais pas. Mon téléphone restait muet. J’avais supprimé son numéro, bloqué ses messages, mais je guettais quand même. C’est ça, le paradoxe : on veut que l’autre disparaisse… mais on reste accro à son absence.

Je ne savais plus penser. Plus parler. Plus me faire confiance.
Tout ce que je ressentais, c’était un grand “je ne sais pas”. Est-ce que j’avais exagéré ? Est-ce qu’il m’aimait quand même ? Est-ce que c’était vraiment si grave ?
Et en même temps, mon corps, lui, savait. Il tremblait. Il pleurait sans raison. Il souffrait comme un animal blessé.

J’étais en état de choc.
Pas le choc hollywoodien, dramatique, visible. Non. Le choc invisible. Celui qui te laisse fonctionnelle mais morte à l’intérieur. Une sorte d’amnésie floue, d’engourdissement général. Comme si mon cerveau s’était mis en veille, juste pour que je ne m’effondre pas tout de suite.

Il m’avait laissée vide. Et j’ai dû accepter cette réalité effrayante : la liberté, c’est d’abord un deuil.

Séquelles d’un pervers narcissique : comment j’ai survécu au chaos intérieur ?

Ce que j’ai fait au lieu d’aller en thérapie

Je n’ai pas fait de thérapie.
À la place, j’ai survécu. Avec ce que j’avais. Ce que je pouvais. Ce qui restait.

J’ai médité, souvent. Parfois en silence, parfois en larmes. Pas pour atteindre le nirvana, non. Juste pour respirer sans douleur. Pour essayer de me retrouver dans ce foutoir mental.

J’ai aussi beaucoup dormi. Ou plutôt, je me suis autorisée à ne rien faire. Mon corps était en vrac. Mon esprit en grève. J’étais un champ de ruines. Et à ce moment-là, le repos, c’était déjà une victoire.

Mais la vie, dans sa perversité parfaite, ne m’a pas laissée tranquille longtemps.
Quelques mois après cette rupture, j’ai plongé dans une autre relation.
Un enfer encore plus dense, plus court, mais plus noir.
Le confinement Covid nous a coincés ensemble. Huit mois d’une vie en huis clos avec un autre homme toxique. Autre profil, mêmes blessures. J’étais fragile, paumée, affamée d’attention. Et j’ai payé cher cette faim-là.

Puis, en mai 2020, mon corps a dit stop.
Une opération chirurgicale m’a presque coûté la vie. J’ai fait une expérience de mort imminente.

Mon témoignage : comprendre mon expérience de mort imminente

Je suis sortie du bloc avec un sentiment étrange : quelque chose m’avait été rendu.
Comme si, au bord du vide, j’avais eu un choix.
Et j’ai choisi de rester. Pas pour les autres. Pour moi. Enfin.

Alors j’ai quitté Paris. Cette ville où j’avais trop souffert. Trop aimé. Trop failli mourir.
Je suis partie à Aix-en-Provence.
Un exil volontaire. Une renaissance discrète.

Ce n’était pas un plan de reconstruction. C’était un acte de survie.
Je n’étais pas encore prête à guérir. Mais j’étais prête à ne plus mourir.

Et ça, c’était déjà immense.

Réapprendre à exister : premiers gestes de survie

Personne ne m’a donné de manuel pour vivre après l’emprise.
Alors j’ai fait ce que je pouvais avec ce que j’avais : des petits gestes. Des actes minuscules. Mais qui, dans mon état, étaient colossaux.

Le premier, ça a été de me lever à nouveau pour moi. Pas pour un autre. Pas pour plaire. Pas pour éviter un reproche. Juste me lever, me laver, m’habiller, même sans sortir. Juste pour sentir que j’étais là. Vivante.

Ensuite, j’ai repris contact avec ma sœur. Avec ma mère. Petit à petit. À mon rythme. Sans culpabiliser. Juste en tendant une main. Elles étaient là. Elles n’avaient jamais vraiment été loin. Mais moi, je m’étais perdue.

J’ai arrêté de chercher un autre sauveur.
Plus de relation tampon. Plus de distractions amoureuses.
J’ai compris que tant que je n’étais pas reconstruite, j’allais rejouer les mêmes schémas. Et je n’avais plus envie de ça. Plus envie de confondre amour et captivité. Plus envie d’être une proie.

J’ai marché. Beaucoup. Dans Aix. Dans la nature. Dans les rues inconnues.
Comme une âme errante, mais libre. Je mettais mes écouteurs. Je respirais.
Je réapprenais à me laisser traverser par le monde sans me sentir en danger.

J’ai aussi écrit. Énormément. Des textes que personne ne lirait. Des lettres jamais envoyées. Des insultes. Des cris. Des souvenirs.
L’écriture a été ma thérapie sauvage. Mon exorcisme privé.

Et surtout, j’ai refusé les injonctions.
Je n’ai pas “pardonné”.
Je n’ai pas “trouvé du sens”.
Je ne suis pas “reconnaissante” de ce que j’ai vécu.
Non. Je suis en colère. Et cette colère, je l’ai transformée en élan.

Un jour, j’ai dit à voix haute :
« Je mérite mieux que juste survivre. »
Et ça a été un tournant.

Guérir sans se venger : quand la haine ne suffit pas

Je ne vais pas mentir : j’ai voulu sa souffrance.
Pas la mienne. La sienne.
J’ai rêvé qu’il se fasse larguer. Ruiner. Insulter. Que sa nouvelle proie lui renvoie sa propre merde en plein visage. J’ai fantasmé des scènes de tribunal. Des lettres anonymes envoyées à son travail. Des photos de lui, nues, exposées. Lui aussi exposé. Nu. Minable.

Mais ça ne m’a pas soulagée.

La haine, c’est comme un feu qui semble réchauffer mais te bouffe de l’intérieur.
Et surtout, elle te garde liée à lui. Tant que je le haïssais, il était encore là. Il avait encore un pouvoir. Il me volait encore mes nuits, mes pensées, mes émotions.
Et j’en avais assez.

Je voulais qu’il disparaisse. Mais pas en tombant d’un balcon. En n’existant plus du tout dans ma tête.

Et c’est là que j’ai compris :
Guérir, c’est refuser de devenir comme lui.

Ce n’est pas être gentille. Ce n’est pas pardonner. Ce n’est pas oublier.
C’est juste refuser de consacrer ma vie à sa mémoire. Même en négatif.
Je ne voulais pas vivre dans sa haine. Ni dans sa peur.
Je voulais vivre sans lui. Même dans mes colères.

Alors j’ai arrêté de surveiller ses réseaux.
J’ai arrêté de parler de lui comme d’un personnage central.
Je l’ai sorti du casting de ma vie.

Je ne me suis pas vengée. Pas parce que je suis noble. Mais parce que je suis fatiguée. Et parce que je veux guérir. Pour moi. Pas pour l’humilier.

Et tu sais quoi ?
Le vrai scandale, c’est que je vais bien.
Pas parfaitement. Mais assez pour qu’il ne puisse plus rien y faire.

Ce que j’ai reconstruit, seule, brique par brique

Il m’a fallu du temps pour m’autoriser à aller bien.
Et plus encore pour croire que j’étais capable de reconstruire quelque chose qui tienne debout.
Pas une vie parfaite. Pas un conte de fées.
Une vie à moi. Une vie où il n’avait plus sa place.

Un an et demi après notre séparation, j’ai fait ce que je croyais impensable : je lui ai écrit.
Une lettre. Pas pour lui. Pour moi.
Je lui disais que je lui avais pardonné. Pas pour l’absoudre. Pour me libérer. Pour arrêter de trimballer sa merde dans ma tête.

C’était sincère. Profond. Important.
Mais comme toujours, il a sauté sur l’occasion.
Le manipulateur n’aime pas les silences. Il sent l’ouverture comme un prédateur sent la blessure.

Je n’ai pas eu besoin d’un psy, j’ai eu besoin de moi

Je ne suis pas devenue une version “guérie” de moi-même.
Je suis devenue la version qui refuse de crever.
Pas parfaite. Pas toujours stable. Mais libre.

Je n’ai pas fait de thérapie. Je n’ai pas suivi de programme de résilience.
J’ai survécu en dormant. En méditant. En écrivant. En coupant. En respirant.
Et en revenant. Encore. Même après les rechutes. Même après les autres enfers.

J’ai eu besoin de temps.
De solitude.
De cris.
De pardon, aussi — pas pour l’autre. Pour moi.

Je lui ai écrit. Je l’ai laissé revenir. Et je l’ai dégagé pour de bon.
Parce que la véritable guérison, ce n’est pas de ne plus souffrir.
C’est de ne plus être à vendre. Ni au chantage. Ni à la terreur.

Aujourd’hui, je ne cherche plus la revanche.
Je cherche la paix.
Et elle est là, enfin.
Pas dans un cabinet. Pas dans une technique.
Dans le choix radical de m’appartenir.

Si tu as vécu ce que j’ai vécu, je ne te souhaite pas de guérir parfaitement.
Je te souhaite de devenir inguérissable par eux.
Intouchable.
Indomptable.

Vivante.

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